Je me souviens d’une équipe de rugby d’une préfecture du Sud-Ouest de la France accédant à l’élite du rugby français il y a 10 ans. Emmenée par un mentor charismatique qui avait su transcender des « laissés pour compte » du rugby, cette équipe avait bousculé tous les codes établis de ce jeu au point de froisser l’establishment de ce sport qui sut se venger 2 ans plus tard.
Je me souviens de cette cohorte de véhicules bardés de jaune et noir filant vers la capitale de feu le Languedoc Roussillon pour une finale d’accession au top14 un dimanche de mai 2009. En serpentant le long des routes du sud-Aveyron, elle faisait sortir et applaudir les gens de chez eux qui doivent encore se demander pour certains ce qu’était que ce défilé !
Je me souviens de ce public, debout, ovationnant ses joueurs qui venaient de battre l’équipe de la capitale venue en tongs pour ce qui fut sans doute le dernier match d’Albi dans l’élite du rugby français au printemps 2010.
Je me souviens de ce petit bonhomme à la casquette, recruté par un président cachotier sur les finances du club et qui pendant 3 ans dut se battre avec des bouts de ficelles pour que le SCA ne disparaisse pas du monde du rugby professionnel.
Je me souviens de ce capitaine, Julien Raynaud, me demandant la permission de faire son interview assis, un soir d’avril 2014, au sortir d’une victoire contre Auch qui les maintenait en prod2. Je me souviens de ce visage et ce corps marqués d’avoir lutté jusqu’au bout pour l’amour de ce club.
Vendredi soir contre Bourgoin il s’est produit quelque chose d’unique dans l’histoire du Sporting Club Albigeois. Car oui la crise est profonde. Malgré la pseudo« labélisation grand stade », les choses ne vont pas. Entre le staff et les joueurs ? Entre le président et son staff ? Entre le président et ses joueurs ? Personne ne veut parler, crever l’abcès qui grossit de plus en plus. Quoi de plus ubuesque que d’entendre un président vous parler d’un stage de 3 jours pour mettre tout à plat et derrière voir ses entraineurs lui dire qu’il ira tout seul, à son stage…
Ce club est malade, de ses racines jusqu’à sa tête. Tout est à revoir, de la formation de ses jeunes jusqu’à l’exécutif. Tous les gens qui ont vociféré sur les joueurs, les entraineurs et le président ont exprimé leur désarroi car, au fond d’eux, ils l’aiment ce club.
Et maintenant ? Maintenant les joueurs doivent réagir, car ce sont eux qui ont la clé. Ils ne doivent rien attendre des autres mais que d’eux même. Orgueil, valeurs, fierté, honneur, amour du maillot, combat, sang, sueur : voilà des mots qui semblent désuets pour certains, galvaudés pour d’autres mais qui pourront faire renaitre un amour qui se délite entre un club et son public.
Qu’importe la victoire. Le prochain match au Stadium d’Albi sera capital pour l’avenir du club. Ce sera contre Aurillac, un 1er Avril, comme un symbole…
En cette période d’anniversaire de la montée en top14 et même si certains n’aiment pas se retourner vers le passé, il serait peut-être bon d’écouter certains anciens, de s’appuyer sur certaines fondation solides. C’est souvent comme ça que les plus belles bâtisses perdurent dans le temps. Albi en possède déjà une, depuis 700 ans, alors pourquoi pas deux ?
Ah si ! Je me souviens d’un entraineur des avants, présent au club depuis 1989, un soir de déroute qui, le regard hagard mais digne me tint les propos suivants : « j’ai la faiblesse de croire que ce club est encore une famille… » Peut-être que la solution est là ?
Sinon ? Amen…
RS.