Andrew Porter, la force mentale de l’Irlande

Pas une star mais un roc: le pilier Andrew Porter, référence mondiale à son poste, incarne parfaitement la force de caractère et la résilience louées par le sélectionneur Andy Farrell après la victoire de l’Irlande contre l’Afrique du Sud samedi (13-8).

Le public irlandais s’époumonait encore de joie aux abords du Stade de France, mais les premiers mots du technicien anglais étaient calmes et posés, à l’image de l’équipe qu’il veut voir sur le terrain.

« J’ai apprécié la résilience des gars. C’était un vrai match. On a réussi à rester concentrés. (…) On a gardé la tête froide et on a obtenu les pénalités quand c’était important », lançait-il en conférence de presse, saluant le mental « fantastique » de son XV du Trèfle.

Pendant 75 minutes, le gaucher irlandais Porter a repoussé les Springboks malgré la fatigue et l’entrée en jeu des nombreux avants du désormais célèbre banc sud-africain en deuxième période.

Avant sa sortie, le pilier du Leinster s’est même payé le luxe de gratter un ballon sud-africain. Ovationné par le public quand il a enfin été remplacé, le Dublinois a été applaudi par son entraîneur des avants, la légende Paul O’Connell, debout dans les tribunes.

– Grosse caisse –

« Andrew a été immense », a salué le lendemain son entraîneur de la mêlée John Fogarty. « Ce qu’il arrive à faire partout sur le terrain, (…) l’énergie qu’il donne aux autres, on est vraiment chanceux d’avoir un gars avec autant de caisse et d’appétit pour le jeu. »

Mais Porter laisse glisser compliments, coups durs et critiques: il en a vu d’autres.

Son caractère s’est forgé très tôt, dans le deuil. Sa mère Wendy est décédée d’un cancer du sein alors qu’il n’avait que 12 ans.

« Il ne se passe pas un jour sans que je pense à elle », a déclaré le pilier du Leinster, qui a son prénom tatoué sur un bras.

Complètement perturbé, l’adolescent d’alors a développé un sévère trouble de l’alimentation. Il ne mangeait plus.

« Je suis passé de l’enfant le plus grand à l’enfant le plus maigre », avait-il révélé lors de la Coupe du monde 2019. « J’ai vu des photos de cette époque il y a quelques années. Je les ai déchirées et j’ai tout jeté. Mais toute cette détresse et cette angoisse ont fait de moi ce que je suis. »

– Metalleux –

A 27 ans, il est devenu un pilier capable d’affronter les Springboks pendant 75 minutes et la maladie. Au début de la Coupe du monde, celui qui est ambassadeur de l’association irlandaise de lutte contre le cancer s’est ainsi rendu avec des coéquipiers dans le service d’oncologie pédiatrique de l’hôpital Clocheville de Tours, où l’Irlande a établi son camp de base.

« C’était une grande leçon d’humilité de voir à quel point ces enfants sont courageux, à quel point ils se battent tous les jours pour être là où ils sont », a-t-il déclaré, s’attirant au passage beaucoup de sympathie en Touraine.

Sympathique et souriant en dehors du terrain, Porter a souvent une intention, un mot gentil, pour les journalistes et les membres du staff irlandais.

Il n’y a finalement qu’un pan de la vie de groupe dans lequel il ne fait pas l’unanimité: le metal. Passionné, le pilier tatoué écoute en boucle Metallica, Iron Maiden, Megadeth, Rammstein ou Slipknot quand il pousse de la fonte.

Mais dans les vestiaires, c’est plutôt à son compère de la première ligne, Tadhg Furlong, que revient la responsabilité de diffuser la musique.

« J’ai mis la musique dans la salle et en moins d’une minute elle a été éteinte, probablement moins d’une minute. Chacun son truc », s’amuse Porter. Il en faudra beaucoup plus pour le perturber.

© 2023 AFP

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