Paris, 22 sept 2023 (AFP) – Le directeur du rugby sud-africain Rassie Erasmus se décrit dans son autobiographie comme « quelqu’un de calme et simple ». A l’approche du choc samedi entre les tenants du titre et l’Irlande, finale avant l’heure du Mondial-2023, personne n’est obligé de le croire.
La personnalité complexe de l’ancien sélectionneur des Springboks, qui en tire toujours les ficelles depuis son nouveau poste, lui vaut son lot de détracteurs, sans doute assez nombreux parmi les instances dirigeantes et le corps arbitral.
Erasmus a été lourdement sanctionné par World Rugby fin 2021 pour avoir méthodiquement critiqué dans une vidéo de plus d’une heure l’arbitrage de l’Australien Nic Berry après un test perdu par l’Afrique du Sud contre les Lions britanniques et irlandais.
A peine autorisé à reprendre ses fonctions, il a publié l’automne dernier une série de tweets sarcastiques se moquant des décisions prises par l’Anglais Wayne Barnes lors de la défaite de son équipe face à la France à Marseille.
Une récidive qui lui a valu deux matches de suspension supplémentaires et une nouvelle tempête médiatique après que la famille Barnes a fait l’objet d’insultes et de menaces.
– Génie tactique –
Ses partisans, et il en a de nombreux, préfèrent voir en lui l’homme qui a redressé une sélection sud-africaine mal en point à son arrivée aux commandes, en 2018, jusqu’à la conduire à son troisième titre mondial l’année suivante au Japon.
Il a cédé depuis le poste de sélectionneur à son fidèle adjoint, Jacques Nienaber, avec lequel il forme une sorte d’hydre à deux têtes capable de toutes les innovations tactiques.
Le staff de l’Afrique du Sud a notamment surpris le mois dernier avec un banc à sept avants, pour un seul arrière, lors de la victoire éclatante sur la Nouvelle-Zélande (35-7) en fin de préparation.
L’expérimentation sera renouvelée contre l’Irlande ce week-end, après avoir entre-temps fait passer des consignes depuis les tribunes à l’aide de phares colorés ou aligné quatre demis de mêlée sur la feuille de match face à la Roumanie.
Autant de curiosités qui portent la patte d’Erasmus, aussi fin tacticien qu’incorrigible provocateur. Même s’il s’en défend.
« Je peux passer pour une grande gueule, un arrogant sans remords aux idées arrêtées », écrit-il dans son autobiographie, « Rassie: Stories of Life and Rugby ». « Les gens pensent que je suis quelqu’un d’extraverti, mais ce n’est pas le cas ».
– Sensibilité –
Les provocations de l’ancien troisième ligne international tranchent avec la sensibilité latente d’un enfant élevé par un père alcoolique qui travaillait comme fonctionnaire pendant les sombres années de l’Apartheid.
Alors en charge du haut niveau au sein de la Fédération sud-africaine, Erasmus a contribué à lancer en 2013 le programme Elite Player Development (EPD) visant à détecter et à accompagner les talents émergents, notamment dans les milieux défavorisés.
« Je voulais aider à corriger les erreurs du passé. Pas seulement l’Apartheid, mais aussi la façon dont nous avons essayé d’arranger les choses, qui n’a servi ni les Noirs, ni les Blancs », a-t-il récemment confié au journal britannique The Guardian.
Les champions du monde 2019 comptaient dans leurs rangs plusieurs joueurs découverts grâce au programme EPD, au premier rang desquels Siya Kolisi, dont Erasmus a fait le premier capitaine noir de l’histoire des Springboks.
« Soulever la Coupe du monde n’a pas été le moment le plus fort », a affirmé au Guardian l’ancien sélectionneur. « C’était de voir les joueurs évoluer et marquer ensemble en finale en se faisant confiance ».
« Représenter leur pays était pour eux un privilège qui leur a permis de dépasser la pression », a-t-il développé. « L’EPD a été ma plus grande réussite ».
© 2023 AFP
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