Premier capitaine noir des Springboks, l’emblématique troisième ligne Siya Kolisi, passé du « township » au sommet du rugby, va entrer un peu plus dans la légende sud-africaine avec son cinquantième capitanat, dimanche lors de la Coupe du monde contre les Tonga à Marseille.
Quand il a brandi la Coupe Webb-Ellis, le 2 novembre 2019 dans la nuit de Yokohama, le solide flanker de 32 ans (1,89 m, 104 kg), à la jeunesse marquée par une extrême pauvreté, est devenu l’un des symboles de la transformation des Springboks, plus de vingt-cinq ans après la fin de l’apartheid.
Quelques mois plus tôt, le 10 juin 2018, Kolisi avait déjà endossé un lourd costume, en devenant capitaine. « C’est quelque chose que je n’aurais jamais imaginé », a raconté le troisième ligne aux 78 sélections. « J’ai commencé le rugby avec mes amis parce que j’aimais ça et ça m’évitait des ennuis mais je n’ai jamais pensé que ça se déroulerait comme ça. »
L’enfant de Zwide, un quartier pauvre de Port Elizabeth (sud), va pourtant bien guider sa sélection pour la cinquantième fois (le record sud-africain est détenu par John Smit, capitaine à 83 reprises entre 2003 et 2011). Un nouveau moment marquant après avoir déjà mené l’Afrique du Sud à un troisième sacre mondial, après 1995 et 2007.
« Être le premier capitaine noir, c’était dur. Je ne comprenais pas: pour moi, j’étais juste le capitaine des Springboks et c’était déjà quelque chose de grand. Mais cela signifiait bien plus pour beaucoup de gens et il m’a fallu du temps pour comprendre le poids qui était sur mes épaules. Plus le temps passait, plus je prenais confiance, notamment grâce à mes coéquipiers et aux membres du staff. Sans eux, je n’y serais pas parvenu », a expliqué Kolisi.
– Comme un symbole –
Le charismatique troisième ligne conserve son éternel sourire éclatant et continue de diffuser un message rassembleur, à destination d’une société fragmentée, après avoir vécu une enfance faite de drames.
Le joueur des Sharks a grandi dans le dénuement, privé d’une mère morte prématurément et sans manger tous les jours à sa faim avant d’obtenir une bourse pour le prestigieux Grey High School, un lycée qui a formé de nombreux internationaux.
Le voilà devenu porte-étendard des Springboks, qui ont longtemps été considérés comme l’un des symboles de la politique d’apartheid (1948-début des années 90) et réservé aux joueurs blancs.
« Mon rôle n’a pas changé depuis le premier jour où j’ai été capitaine. Je n’ai pas à prendre toutes les décisions, je dois simplement bien jouer et parler avec l’arbitre. Capitaine ou non, il faut tout donner sur le terrain et travailler en équipe. Nous nous engageons les uns envers les autres et pas seulement pour ceux qui sont sur le terrain mais aussi pour tous ceux qui nous regardent », a-t-il confié.
Le futur joueur du Racing 92, qui avait révélé son addiction à l’alcool dans une autobiographie (Rise, 2021), a su rester humble, lui qui est l’une des pièces maîtresses des Springboks. Les craintes liées à son potentiel forfait avant le Mondial à cause de sa blessure à un genou n’ont fait que confirmer son importance au sein de la sélection sud-africaine.
« Siya est probablement le visage de l’Afrique du Sud auprès du public et des médias », a assuré son sélectionneur Jacques Nienaber, avant d’ajouter: « En tant que capitaine, il représente l’équipe mais il performe également sur le terrain et c’est probablement la chose la plus importante ».
Cinq ans après sa première sortie comme capitaine des Boks, Kolisi devra à nouveau mener son équipe vers la victoire dimanche (21h00) pour lui permettre de décrocher sa qualification en quarts de finale de la Coupe du monde.
© 2023 AFP
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