Rugby: derrière les Worcester Warriors, une Premiership anglaise bien fragile

Rugby: derrière les Worcester Warriors, une Premiership anglaise bien fragile

Londres, 14 sept 2022 (AFP) – A peine remis du scandale des Saracens, relégués il y a deux ans pour dépassements répétés du plafond salarial, la Premiership anglaise est à nouveau confrontée à ses faiblesses structurelles avec le risque de faillite des Worcester Warriors.

C’est dans une ambiance bien morose que la saison 2022/2023 a démarré le week-end dernier, au pays du rugby confronté à une crise quasi-existentielle au niveau des clubs.

L’équipe du centre de l’Angleterre, étranglée par une dette de 25 millions de livres (29 M EUR), dont un quart environ d’impôts impayés qui devront l’être le 6 octobre, semble avoir sauvé sa tête in extremis.

Les propriétaires du club Colin Goldring et Jason Whittingham ont annoncé mardi un accord de principe avec un repreneur potentiel non-identifié, sur fond de salaires impayés et de joueurs ayant demandé la résiliation de leur contrat pour changer de club.

Mais rien n’est signé pour l’heure et la Fédération anglaise, la très puissante RFU, qui doit donner son accord, a indiqué ne pas avoir été informée.

Le temps presse pourtant. Quelques 140.000 euros seraient nécessaires immédiatement pour que se tienne, dimanche, la réception d’Exeter.

Si la vente échoue, le club devra déposer le bilan et sera automatiquement relégué.

Depuis leur retour dans l’élite en 2015, les Warriors ont toujours joué le maintien et leur effectif n’a rien de bien clinquant, malgré la présence d’une poignée d’internationaux dont les Ecossais Duhan van der Merwe et Rory Sutherland, l’Anglais Ollie Lawrence ou l’ancien Springbok Francois Venter.

– Un club sur deux endetté ou démoralisé –

Personne n’accable pourtant le club, conscient que l’équilibre économique de bien d’autres est très précaire.

Selon une enquête du Guardian lors de la journée de lancement de la nouvelle saison, au tout début du mois, près de la moitié des treize clubs de l’élite sont lourdement endettés ou ont des propriétaires qui n’excluent pas de passer la main.

« Nous avons besoin d’une solution parce qu’aucun club ne gagne d’argent. Worcester est juste en première ligne pour mettre au jour les fragilités du sport professionnel après la pandémie », a averti le directeur du rugby des Warriors Steve Diamond à la radio BBC5.

L’abaissement du plafond salarial de 7 M EUR à 5,8 M EUR à l’orée de la dernière saison ne semble pas suffire.

Diamond va même jusqu’à suggérer une cure d’amaigrissement: « à mon avis, c’est terminé l’époque où on pouvait avoir un directeur du rugby et un entraîneur principal. Ce sont deux personnes qui font le même boulot et on doit fusionner (le poste) », a-t-il asséné.

« Est-ce qu’on a besoin d’un entraîneur des avants, d’un entraîneur de la défense et de tout un tas d’autres entraîneurs ? (…) On doit évaluer tout ça, y compris de combien de joueurs on a besoin », a-t-il renchéri dans le Guardian.

– Renégocier le contrat avec la Fédération –

De son côté, Premiership Rugby veut croire qu’il existe des marges commerciales pour augmenter le chiffre d’affaires des clubs.

« Il y a neuf millions de fans de rugby en Angleterre et les compétitions de club n’en mobilisent qu’une part relativement faible. Compte-tenu de la qualité du produit, nous sommes convaincus que l’on peut attirer davantage de monde », a ainsi souligné Simon Massie-Taylor, directeur exécutif de Premiership Rugby.

Alors que l’inflation risque d’exploser, taillant sévèrement dans les porte-monnaies des fans et faisant exploser les coûts fixes des clubs — on parle d’une multiplication par quatre de la facture pour l’éclairage des stades –, les étoiles semblent pourtant loin d’être alignées pour que ce scénario se mette en place.

La concurrence aussi bien commerciale que sportive des compétitions internationales, avec des joueurs régulièrement mobilisés par leur sélection nationale au détriment des clubs, entrave également le développement du rugby de club en Angleterre.

En 2024, le contrat de huit ans qui régule les relations entre les clubs et la RFU arrive à échéance. Cela ouvrira sans doute une fenêtre cruciale au rugby anglais pour réfléchir aux moyens d’offrir un avenir meilleur à ses clubs.

© 2022 AFP

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