Londres, 8 mars 2023 (AFP) – Après l’avoir peu utilisé jusqu’ici dans le Tournoi des six nations, le sélectionneur anglais Steve Borthwick est tenté de lancer son feu-follet Marcus Smith à l’ouverture contre la France, samedi, lors de la quatrième journée, un choix qui trancherait avec son pragmatisme revendiqué.
Titulaire contre l’Écosse, alors qu’Owen Farrell avait débuté au centre, Smith avait été montré du doigt pour avoir tenté une action solitaire à 20-19 pour les Anglais, finalement battus 29-23 chez eux.
Malgré le soutien notamment du double champion du monde néo-zélandais Sonny Bill Williams sur Twitter, Smith n’était apparu ensuite que huit minutes contre l’Italie (31-14) et quatorze secondes contre le pays de Galles (20-10).
Au début de la semaine dernière, il avait même été écarté du stage d’entraînement de trois jours à Brighton et laissé à la disposition de son club, les Harlequins, pour « pour s’affûter un peu en match », avait justifié Borthwick.
Ce que Smith a fait avec brio, menant son équipe à une large victoire 40-5 contre Exeter, en étant élu homme du match après avoir inscrit 10 points au pied et avoir mené, comme attendu, l’animation offensive, des siens, à l’origine directe notamment de deux essais.
– Une « masterclass » face à Exeter-
Au micro de BT Sports, il s’était défendu d’avoir voulu envoyer un message à son sélectionneur: « ce n’est pas ce qui m’occupait l’esprit, il s’agissait surtout de prendre du plaisir dans mon rugby ». Mais d’autres l’ont fait pour lui.
« C’était l’exemple parfait de ce que Smith peut créer si on lui en donne la liberté », avait souligné le Guardian après le match.
« Ce qu’on a vu ce soir, c’est une +masterclass+ en termes de création d’espaces », l’avait encensé son coach en club, Tabai Matson.
« Il a fait ce que Steve (Borthwick) lui a demandé. Est ce qu’il sera une option (pour le match) cette semaine ? Seul Steve le sait mais il s’est montré sous son meilleur jour et il a montré qu’un autre jeu est possible » pour l’équipe d’Angleterre, a-t-il ajouté.
Et tout le dilemme sera là pour Borthwick, qui a rappelé Smith dans le groupe pour préparer le match contre la France cette semaine.
« J’ai trouvé que Marcus avait été exceptionnel. On l’a tous trouvé », avait admis mardi Kevin Sinfield, l’adjoint de Borthick en charge de la défense.
Mais la défense n’est précisément pas le point fort de Smith, alors que c’est l’un des socles sur lequel le nouveau sélectionneur, nommé quelques semaines avant le Tournoi, s’appuie pour le moment, avec le jeu au pied et la conquête.
– Farrell fragilisé par son jeu au pied défaillant –
Le jeu flamboyant des Harlequins — à l’échelle de la Premiership anglaise, du moins — tranche avec celui de la sélection, même si l’entraîneur adjoint en charge de l’attaque chez les « Quins », Nick Evans, est aussi celui de Borthwick, en sélection.
La faible réussite au pied d’Owen Farrell depuis le début du Tournoi, — 47%, dont 2/6 à Cardiff –, fragilise la position du capitaine qui semble aussi menacé au centre par l’émergence du joueur de Bath, Ollie Lawrence, lors des deux derniers matches.
Lui préférer le joueur sans doute le plus à même de soutenir la comparaison en termes de « french flair » face à des Bleus qui n’ont plus gagné à Twickenham depuis 2005 serait certainement la décision la plus forte du court mandat de Borthwick.
« Si l’Angleterre veut un ouvreur qui joue à la roulette avec une impulsion calculée, il n’y pas mieux (que Smith) dans le pays. S’ils veulent quelqu’un de régulier dans ses pourcentages et qui donne la priorité à l’occupation du terrain et à un jeu au pied incessant, il y a des options plus pragmatiques à disposition », avait résumé le Guardian.
Mais « ce serait un gâchis de talent colossal si Smith se retrouve relégué à tenir les sacs de plaquage ou les bouteilles d’eau à court et moyen terme », avait immédiatement ajouté le quotidien.