L’exploit fidjien face à l’Australie ? Pas si surprenant

Les Fidji, auteurs d’une victoire historique dimanche contre l’Australie au Mondial-2023, récoltent les fruits de leur politique de développement axée sur la fondation d’une franchise, les Fijians Drua, et l’apport de joueurs confirmés évoluant en Europe, mais leur marge de progression est encore énorme.

Battre les Wallabies, les Fidjiens attendaient ça depuis 1954. « C’est fou, c’est énorme », s’est exclamé le néo-lyonnais Semi Radradra, ailier star de l’équipe, après le succès (22-15) à Saint-Étienne.

Cet exploit, s’il demande encore confirmation, n’est pas si surprenant pour la nation du Pacifique dont l’effectif compte d’excellents joueurs, habitués aux joutes européennes.

Outre Radradra, passé par Bordeaux-Bègles et Bristol, en Angleterre, les « Flying Fijians » s’appuient sur le troisième ligne Levani Botia, double vainqueur de la Champions Cup avec La Rochelle. Le capitaine et trois-quarts centre Waisea Nayacalevu a lui remporté pour la deuxième fois la « petite » coupe d’Europe, le Challenge européen, en mai, après l’avoir conquise avec le Stade français où il a évolué pendant dix ans…

Mais le fort contingent « européen », n’explique pas tout. La nation du Pacifique dispose aussi depuis deux ans d’une équipe de Super Rugby, la compétition opposant les provinces néo-zélandaises, australiennes et… désormais fidjiennes.

– Apport des Drua –

Les Drua sont constitués de jeunes joueurs. Dès leur deuxième saison en Super Rugby, ils ont atteint les phases finales de la compétition, butant en quart-de-finale contre les Crusaders néo-zélandais, futurs vainqueurs.

En abordant le Mondial, ces jeunes n’ont donc pas découvert le très haut niveau, comme l’a souligné Eddie Jones, le sélectionneur australien. « L’apport des Drua, c’est la rentrée de ce jeune talonneur (Tevita Ikanivere, NDLR) en deuxième période, qui est aussi bon que le titulaire », a souligné Jones.

Lorsque Sam Matavesi, Fidjien d’origine mais né en Angleterre et évoluant à Northampton, est effectivement sorti, la mêlée fidjienne a maintenu sa domination sur l’Australie.

Et si la touche fidjienne a été le point noir dimanche en partie à cause des lancers de Ikanivere, nul doute que les matches de haut niveau le feront progresser dans le domaine.

Les Fidji n’étaient pourtant pas au mieux en février, à six mois du Mondial, quand il leur a fallu retrouver un sélectionneur après le départ du Néo-Zélandais Vern Cotter. La Fédération a opté pour Simon Raiwalui, 39 sélections avec les Fidji, qui connait les coutumes de ses joueurs et les a intégrés à son mode de management.

– Intégrer le Rugby Championship –

A Lormont, près de Bordeaux, où ils ont établi leur camp de base, les Fidjiens n’ont ainsi pas investi un luxueux hôtel comme les autres équipes, mais dorment à même le sol, sur des couches traditionnelles, dans un gymnase.

A leurs moeurs si particulières pour les Européens, Raiwalui, biberonné au rugby occidental, a apporté la rigueur, en défense et en conquête notamment, qui faisait souvent défaut aux talentueux Fidjiens.

Et quand les grandes nations ne peuvent plus se passer d’un staff pléthorique, Raiwalui se contente de quelques adjoints, sans que cela n’altère les performances de l’équipe. « Franchement, j’échange la possibilité d’avoir un staff rempli de spécialistes contre celle de jouer des matches de très haut niveau plus souvent tous les jours », a-t-il souligné dimanche.

Comme les Samoa ou l’Uruguay qui réclament à World Rugby, l’instance mondiale, plus de matches à jouer, les Fidji se verraient bien à court terme intégrer le Rugby Championship avec la Nouvelle-Zélande, l’Australie et l’Argentine pour pouvoir se frotter tous les ans aux meilleures nations du monde.

« J’ai joué plus de 14 ans pour les Fidji, je compte 53 sélections, a expliqué Seremaïa Baï, l’un des adjoints de Raiwalui, passé par Clermont et Castres. En à peine six ans de carrière, les joueurs des meilleures nations culminent à près de 100 sélections. Cela en dit long ce que cela apporterait à nos joueurs d’intégrer le Rugby Championship ».

Ils n’attendraient plus 70 ans pour battre de nouveau l’Australie.

© 2023 AFP

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